Destruction du Parc de la Marahoué : l’agriculture intensive comme solution durable

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Érigé en parc national en 1968, le parc de la marahoué connaît aujourd’hui une exploitation abusive du fait d’une agriculture extensive et d’une occupation illégale. La recherche de terres arables par les populations riveraines et celles d’ailleurs, principale cause de ce phénomène, pourrait trouver solution avec l’expérimentation de pratiques culturales durables en dehors de ce parc.

C’est sûrement l’une des meilleures alternatives pour faire barrage au désir d’extension de leurs superficies cultivables. Les villages de Garango, Gobazra, Dabouzra, Blaisekro, N’doli Yaokro, Danagoro que nous avons visités, sont tous contigus au parc de la Marahoué. Dans ces localités, le désir croissant des populations d’agrandir leurs espaces cultivables afin de maximiser les récoltes reste palpable.

À Blaisekro, par exemple, le Chef N’Guessan Kouamé ne cache pas son désir d’accroître sa parcelle pour subvenir à ses charges grandissantes vu que « les plants d’hévéa ont appauvri le sol », explique-t-il. Mais, il a été très vite « dissuadé » voire « menacé » par les agents des Eaux et Forêts et de l’Office Ivoirien des Parcs et Réserves OIPR) qui « visitent régulièrement ce village », nous a-t-il confié.

*sensibilisation des populations de Badouzra par l’ONG Santé Animale d’Afrique
sensibilisation des populations de Badouzra par l’ONG Santé Animale d’Afrique

Le problème étant connu, il faut trouver des solutions. L’une des premières alternatives proposées à ces paysan(ne)s est la pratique de nouvelles techniques agricoles. Selon Mme GBO Amin, Chef Division changement climatique à l’Agence Nationale d’Appui au Développement Rural (ANADER), pour résoudre la question de la pauvreté des sols « Le compost et la jachère améliorée » sont efficaces et surtout leur réalisation n’engrange aucun frais supplémentaire aux agriculteurs. Pour précision, le compost est une matière organique obtenue à la suite de la dégradation de matières végétales et animales. Quand la jachère améliorée est une technique de planting d’arbres.

Parallèlement, il est impératif de former et faire prendre conscience aux paysans de l’importance du parc. L’ONG Santé Animale Afrique l’a compris. Elle organisait une séance de sensibilisation sur le sujet, le 18 août 2022, à Dabouzra. Pour le Président de cette structure, Gnombléa Aquilas, en plus de moderniser l’agriculture, il serait intéressant, pour les riverains, « de développer des Activités Génératrices de Revenus en complément ». Il cite, par exemple, « La création de champs maraîchers pour les jeunes et les femmes, l’élevage non-conventionnel d’escargots, d’agoutis etc. ».

Du côté des autorités on brandit le chiffon rouge. Le 4ème adjoint au maire de Bouaflé, Blé Bi Kessé martèle que « Les populations illégalement installées devraient être déguerpies ». À contrario, l’autorité municipale annonce que son institution fait un plaidoyer auprès de l’Etat pour que « le parc qui faisait la fierté de la région retrouve son patrimoine d’alors qui a pratiquement diminué voire disparu ». Il poursuit en invitant les agriculteurs riverains à « se rapprocher des structures spécialisées pour un accompagnement et un encadrement efficient que la mairie pourrait soutenir ».

Notre reporter en compagnie de Blé Bi Kessé, 4ème adjoint au maire de Bouaflé

Pour éviter d’infiltrer le parc et s’exposer à des sanctions, Jonathan Seri, Anthropologue spécialiste du développement communautaire et de la planification, conseille « un renforcement de l’action des structures d’encadrement comme le Centre National de Recherche Agronomique au sein des communautés ». L’une des premières approches que propose l’Anthropologue est la sensibilisation et la formation « des paysans riverains sur les techniques agricoles saines et moins destructrices de l’environnement (l’agroforesterie par exemple) et les accompagner dans la pratique de l’agriculture intensive », préconise-t-il.

Au-delà de la formation et de la sensibilisation, l’universitaire recommande fortement l’encadrement des paysans en mettant à leur disposition des intrants adaptés, de préférence des « engrais et produits phytosanitaires bio » a-t-il cité.

La plupart des personnes rencontrées affichent de bonnes dispositions à moderniser leurs pratiques agricoles. À Badouzra, par exemple, Gooré Antoinette, agricultrice aux encablures du parc, se dit favorable. « Ma sœur et moi, certes avons besoin de plus d’espace pour cultiver mais si une technique peut nous permettre de ne pas agrandir notre champ et avoir une bonne récolte nous adhérons totalement », affirme-t-elle.

Avis identique à Danagoro. Le Président des jeunes Gohi Bi appelle de tout vœu à la formation des jeunes de son campement à ces nouvelles méthodes culturales (compost et jachère améliorée). « L’objectif final est d’avoir une meilleure récolte. Tout ce qui pourrait favoriser ce résultat, la jeunesse y souscrit », soutient-il.

 

En compagnie du Chef de Blaisekro (à droite) dans sa plantation

Si les paysan(ne)s riverain(e)s montrent de bonnes dispositions ; l’OIPR, pour sa part, invite ceux qui y sont illégalement installés à sortir, sans délais. D’ailleurs « quelques villages ont été déguerpis, à l’image de Moussagbêkro et cela continuera », à en croire Gohi Bi.

Koua N’Zi Daniel, enseignant-chercheur Eaux, Forêts et Environnement et ex-agent à l’OIPR suggère en plus des techniques culturales « la réalisation d’activités écotouristiques ». L’enseignant-chercheur pense que « la conservation du parc de la Marahoué doit être profitable pour les populations riveraines à l’instar de celles du parc national de Taï qui bénéficient d’activités génératrices de revenus et de projets de développement communautaire ». Mais tout cela, conclut-il, passera par « la sensibilisation et l’éducation des populations riveraines du parc de la Marahoué à conserver l’environnement », ce à quoi s’attelle BENKADI.

Dofra Sekongo

 

Ce reportage est réalisé dans le cadre du Programme d’appui aux médias CSCI-Benkadi

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