Le contexte actuel du réchauffement climatique et ses effets corollaires commandent une réaction appropriée des décideurs. Le gouvernement ivoirien semble avoir bien perçu l’urgence. La Côte d’Ivoire va se doter d’un nouveau code de l’environnement bientôt, si la loi qui a été adoptée en commission le 1er juin 2023 est votée en plénière par les deux chambres. Cette réforme intervient vu que le code de 1996 ne répond plus aux réalités du moment. Dans cet élan, les organisations de la société civile engagées dans la protection de l’environnement à travers le projet BENKADI, poursuit leur plaidoyer pour que l’ objectif (vote du nouveau code de l’environnement) soit atteint.
Adapter ou trouver des solutions aux effets climatiques liés à la dégradation de l’environnement, il en faut. Les raisons.
Dame Tiafiplé Silué, la cinquantaine révolue, est présidente de la coopérative agricole « Wobin » de Oliôkaha (sous-préfecture de Napié), village situé à une trentaine de kilomètres de Korhogo dans le nord de la Côte d’Ivoire. Une coopérative spécialisée dans la production d’arachides, de maïs, de riz, de mil et autres céréales.
Elle explique que cela fait plusieurs années consécutives que les récoltes ne donnent plus satisfaction quand elle fait la comparaison avec celles d’alors. Et pour cause « la pluviométrie a changé et le sol est devenu plus pauvre qu’avant », justifie l’agricultrice dans un échange téléphonique.
Dans un autre registre, ce sont nos villes, villages ou quartiers qui sont menacés de disparition par la montée des eaux si rien n’est fait. En Côte d’Ivoire, les villes d’Abidjan et de San Pedro sont désormais dans la zone « rouge », selon les experts. Par exemple, le quartier littoral de Gonzagueville dans la commune de Port-Bouët, à Abidjan, a régulièrement connu des montées des eaux de la mer causant dégâts matériels et déplacement des populations. L’exemple du village de Lahou-Kpanda n’est plus à présenter.
Les communes de Koumassi et de Marcory sont également menacées par l’érosion du fait de l’avancée progressive de la lagune Ebrié. « Le niveau de la mer, si l’on ne prend pas de mesure adéquate, pourrait monter de 25 cm à un mètre, la presqu’île de Petit Bassam (Port-Bouët, Koumassi et Treichville) sera sous l’eau », a prévenu en 2021 N’Guessan Yao Thomas, Professeur de chimie théorique et membre de l’Académie des Sciences, des Arts, des Cultures d’Afrique et des Diasporas Africaines (ASCAD).
Ces réalités vécues par les populations nécessitent une prise de conscience collective afin d’agir pour favoriser une meilleure résilience de celles-ci.
Pour apporter une réponse à toutes ces préoccupations, l’Etat de Côte d’Ivoire a mis sur la table des députés un projet de loi portant réforme du code de l’environnemental. Ce projet est porté par le Ministère en Charge de l’Environnement et du Développement Durable. Ce nouveau code prend en compte les questions de changement climatique, la résilience communautaire, le genre et l’inclusion, la conservation de la biodiversité, l’agriculture, la déforestation etc.
Selon le Ministre Jean Luc ASSI : « ces nouvelles données ont emmené son département à prendre des dispositions pour élaborer ce code en tenant compte de tous ces enjeux du moment. Cette loi exigera désormais le traitement des déchets issues de tous ces produits par les producteurs, les fabricants et les importateurs etc. L’objectif étant d’assurer un environnement saint pour que les ivoiriens puissent bénéficier de leur entière santé », a-t-il clarifié.
Cette aspiration est partagée par la Convention de la Société Civile Ivoirienne et ses partenaires qui depuis 2021 mènent le plaidoyer de la réforme du code de l’environnement.
Ces innovations majeures intégrées au texte ont rencontré l’assentiment des députés membres de la Commission de la Recherche, de la Science de la Technologie et de l’Environnement (CRSTE) du Parlement. Le 1 juin 2023 dernier, après des échanges intenses et constructifs suivis d’amendements cette commission a adopté à l’unanimité le projet de loi. Pour le député Jean Gervais Tchéidé, désormais « les populations ivoiriennes sont protégées et les pollueurs intentionnels seront vigoureusement sanctionnés », a-t-il révélé. Par anticipation, il a invité ses pairs a « plébiscité » ce texte le moment venu en plénière.
Il faut noter que le nouveau code de l’environnement est composé de 259 articles repartis en 7 titres. Certains articles comme l’article 14 insiste sur la prise en compte des problèmes spécifiques liées aux personnes vulnérables tels que les femmes, les jeunes, les personnes en situation de handicap, les personnes du 3ème âge etc. cibles du projet.
Ces dispositions et précisions sont un soulagement pour certaines organisations de la société civile. L’Association des femmes Juristes de Côte d’Ivoire (AFJCI) se félicite que les défis liés au genre soient intégrés. Pour Mme Ingrid ANZAN, Juriste Consultante à l’AFJCI « la prise en compte du genre permettra de réduire les inégalités, de lutter contre les discriminations, de promouvoir l’égalité entre les sexes, de favoriser la participation des hommes et des femmes », cite-t-elle.
Pour elle, il faut rappeler que « les changements climatiques occasionnent les difficultés d’accès aux ressources productrices, la pénibilité du travail des groupes vulnérables, l’aggravation de la pauvreté, la faible autonomisation, l’appauvrissement des sols arabes, les difficultés d’accès à l’eau etc. Les précisions de la question du genre dans ce nouveau code de l’environnement viennent donc pour prendre en compte les spécificités de tous (hommes et femmes) à l’effet de trouver des solutions durables aux difficultés auxquels font face les communautés », a-t-elle commentée. Elle encourage les parlementaires et sénateurs à faire le bon choix « en votant ce texte » pour mieux protéger les populations qu’ils représentent.
Pour Dr Souleymane Cissé, Expert en Environnement sur le projet BENKADI « ce code est une avancée notable pour la Côte d’Ivoire, espérons qu’il soit très vite programmé et adopté en plénière par les deux chambres du parlement pour que son application soit effective », a-t-il souhaité.
Dofra Sekongo
Article réalisé dans le cadre du Programme d’appui aux médias CSCI-BENKADI